Comment considérer les péchés involontaires ?

Article de Jeremy Pierre pour Tabletalk Magazine publié initialement en juin 2016. Jeremy Pierre est professeur de relation d’aide à la faculté Southern (SBTS), à Louisville (KY, USA). Traduction : Guillaume Bourin

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Des instincts entraînés –c’est ainsi que les pilotes de chasse peuvent réagir immédiatement à des situations rapidement évolutives lorsqu’ils utilisent des machines de guerre à 27 millions de dollars. Lorsqu’un avion ennemi s’approche, les pilotes n’ont pas le temps de réfléchir à ce qu’il convient de faire. Ils doivent se fier à leur instinct, mais il n’est pas uniquement question ici d’instinct naturel : nous parlons ici d’instincts façonnés au plus profond d’eux-mêmes pendant des années d’entrainement. Les innombrables petites décisions qu’ils prennent dans le cockpit sont automatiques, mais cela ne veut pas dire que ces décisions sont involontaires. Le pilote s’est volontairement entraîné pour pouvoir les prendre et, dans le poste de pilotage, il en récolte les fruits.

C’est là une bonne illustration de la façon dont les péchés involontaires fonctionnent. Pouvons-nous être coupables de réactions pécheresses qui semblent surgir en nous « automatiquement » ? Peut-on vraiment considérer le péché comme volontaire s’il n’est pas consciemment choisi ?

La vision biblique de l’expérience humaine est suffisamment répond par l’affirmative. Les Écritures décrivent trois caractéristiques des péchés involontaires :

(1) Ils procèdent de l’ignorance de la volonté de Dieu
(2) Ils ne sont donc pas le fruit d’une décision consciente de commettre un acte hostile à Dieu
(3) Cependant ils constituent un acte désobéissance.

 

Lévitique 5.17 décrit le péché involontaire comme une faute commise « sans le savoir contre l’un des commandements de l’Eternel, des choses qui ne doivent point se faire ». Pierre déclare à ses frères juifs gardiens de la loi qu’ils ont fait « mourir le Prince de la vie » parce qu’ils agissaient « dans l’ignorance » (Ac 3.15, 17). Paul raconte à son auditoire grec épris d’idoles que leur longue tradition artistique était en réalité la conséquence de « temps d’ignorance » dont Dieu ne tient désormais plus compte (Ac 17.30).

Les Juifs ont tué Jésus. Les Grecs fabriquaient des idoles. Ces deux actions étaient des expressions instinctives de coeurs conditionnés, non par la Parole révélée de Dieu, mais par un ensemble de croyances et de valeurs différentes et cependant pécheresses. Les juifs du premier siècle croyaient en un dieu légaliste de leur propre invention et mettaient en avant leur propre version culturelle de la justice ; les Grecs croyaient en des dieux faits de main d’homme et se flattaient de la beauté de leur imagination. Les actions de ces deux groupes révèlent simplement la profondeur de leur ignorance. Les Juifs n’ont jamais considéré le meurtre de Jésus comme un péché, comme un acte hostile à Dieu. Les Grecs n’ont jamais considéré que leur poursuite des plaisirs terrestres était une rébellion contre la moralité divine. Ces actions, cependant, tombaient bel et bien dans la catégorie « péché ».

Il en va de même pour nous. Nos réactions proviennent de quelque part –du fond de nos coeurs dont nous sommes intendants. Nous sommes les gardiens de ces réalités plus profondes de notre être tout autant que de nos expressions de surface. Ainsi, nous pouvons pécher sans exercer le moindre choix délibéré, et ce tout simplement parce que nous agissons toujours intuitivement, nos coeurs étant conditionnés par le péché. C’est ce paradigme que Jésus décrit lorsqu’il affirme que « c’est de l’abondance du cœur que la bouche parle » (Mt 12.34).

Tout comme les heures d’entraînement intensif d’un pilote de chasse, notre cœur est soumis à un régime qui donne forme à nos réactions instinctives –un régime composé de croyances et de valeurs qui sont étrangères aux Écritures, qui nous sont inculquées au travers de ce que nous laissons entrer dans notre tête et par les autres sources de sagesse qui nous sont offertes, celles que nous considérons culturellement appropriées. Toutes ces choses façonnent nos péchés involontaires.

Pensez à la façon dont des péchés tels que la partialité (Ja 2.1) ou la jalousie (3.14) […] fonctionnent. Il est rare que les gens décident intentionnellement de faire preuve de partialité. Pourtant, ils sont instinctivement attirés par une belle personne qui entre dans la pièce. Pourquoi ? En raison de leur préconception de ce qui est attirant. La jalousie n’est autre que l’impulsion automatique qui surgit en moi lorsque la valeur profonde que j’accorde à une certaine chose rencontre ma présomption cachée d’un droit que j’aurais sur celle-ci. […]

Ces péchés n’ont généralement pas de « moment décisif » ; ils émanent, en quelque sorte, de notre vitalité. Et comme si cela ne suffisait pas, ces péchés involontaires basiques peuvent aussi se manifester sous des formes plus complexes : la partialité peut s’exprimer sous la forme de racisme, la jalousie sous la forme de d’addiction au travail, etc.

Les péchés d’ignorance ne peuvent être corrigés qu’avec la connaissance. Loin d’être une excuse pour le péché, l’ignorance est l’élément qui nous y maintient. Nous prenons conscience des péchés involontaires –et, par voie de conséquence, devenons capables de les combattre– par une parole extérieure de Dieu. Dans le Lévitique, l’homme qui a péché par ignorance « réalise sa culpabilité » (= « se rendra coupable », LSG) en découvrant la volonté de Dieu telle qu’elle est énoncée dans les Écritures (5.17). La solution de Pierre au meurtre de Jésus est de renvoyer aux prophéties de l’Écriture ces juifs ignorants de la Parole de Dieu (Ac 3.18). Paul, quant à lui, discoure sur l’idolâtrie des Grecs et leur parle du Dieu unique qui n’est pas fait d’or ou d’argent (Ac 17.29). Ce n’est qu’avec cette nouvelle conscience de la vérité qu’ils pourront peut-être prendre des mesures contre leur péché non-intentionnel : « Repentez-vous donc et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés  » (Ac 3.19).

Si nous l’utilisons correctement, l’Écriture est ce couteau –une épée, en réalité– qui coupe profondément (Hé 4.12). Mais s’il coupe si profondément, c’est dans le but de sculpter le dessein glorieux, instinctif que Dieu a mis en nous quand il nous a sauvés. Quand une personne croit en la Parole de Dieu, elle reçoit un esprit caractérisé par la justice de Christ dont jaillit une compréhension spirituelle renouvelée (1 Co 2.14-16). Cette même conception qui rend les êtres humains capables de pécher instinctivement est désormais utilisée pour le bien. Quand les êtres humains placent leur confiance en Christ, ils reçoivent sa justice –non seulement en tant que déclaration de leur justification devant Dieu, mais également comme une puissance vivante qui remodèle leur faisceau de croyances, de valeurs fondamentales, et les réactions instinctives qui en découlent (sanctification). Leurs réactions automatiques se caractérisent désormais par une plus grande droiture.

Des instincts entraînés, donc, mais désormais sous un nouveau régime.

 

 

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