En quoi Jésus-Christ est-il « le seul médiateur » ?

Nous faisons facilement référence, dans nos Églises ou lors de rassemblements d’évangélisation, au Christ en tant que Seigneur et en tant que Sauveur. Et nous faisons bien. Mais nous oublions malheureusement trop souvent de le présenter comme médiateur. Et pourtant, cette aspect de son œuvre est primordial. Nous allons tenter, dans cet article, de voir en quoi cette notion est importante.
De mon point de vue, si nous l’oublions si régulièrement, c’est tout simplement parce que nous ne savons pas clairement ce que cela signifie. Commençons donc par définir ce que signifie « médiateur ». Le médiateur est une personne choisie pour jouer le rôle d’intermédiaire entre deux parties opposées. Il est chargé d’apaiser les conflits et de régler les litiges. De nos jours, on peut en faire son métier, et l’exercer aussi bien dans le domaine de l’entreprise que pour des couples ou en milieu défavorisé. Et ce n’est pas étonnant ! Notre monde pécheur est rempli de conflits qui éclatent en permanence. Qui n’a jamais eu besoin de faire appel à une tierce personne pour régler un problème, que ce soit par le biais d’un professionnel ou d’une connaissance de confiance ? Pour ma part, j’exerce une profession qui m’amène à être en contact permanent avec des enfants, et je peux vous affirmer que le rôle de médiateur m’incombe régulièrement à cause de toutes les chamailleries entre ces petits.
Notre société est donc en perpétuelle recherche de médiation. Ne serait-il donc pas plus judicieux de présenter cet aspect du Christ plutôt que de parler de « Seigneur » – un terme qui n’a que peu de résonance dans l’esprit de nos contemporains ?
Par ailleurs, le médiateur est un thème important de la théologie biblique, car de nombreuses personnes ont servi de médiateur entre Dieu et le peuple d’Israël. Citons par exemple Moïse (Ex 32), les rois, ou bien encore les prophètes. On se souviendra également de l’épisode d’Abraham qui négocie la survie de son neveu Lot (Gn 18).
Mais, malheureusement, leur médiation était imparfaite. Si nous nous référons au schéma « création-chute-rédemption », c’est bien dans la partie « chute » que nous devons classer ces personnes. Ce qui nous fait entrer dans la « rédemption », c’est la mort et la résurrection de Christ. Il devient ainsi l’unique médiateur pour une multitude, voire davantage, car l’œuvre du Christ se présente à la création toute entière. Il est devenu médiateur de la création et du salut.
 
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Médiateur de la Création

L’hymne en Colossiens, ainsi que d’autres passages, révèle Christ comme médiateur de la Création. En effet, Christ est l’auteur de la Création aux côtés du Père (Jn 1.3 ; He 1.2). C’est par sa Parole que Dieu a créé le monde ex nihilo (Gn 1.3). L’apôtre Jean nous affirme par ailleurs que cette Parole divine, ce logos n’est autre que Jésus-Christ. Jésus est donc le créateur éternel. C’est « par lui », « à travers lui », et « pour lui » que tout a été créé. De plus, nous lisons que c’est aussi « en lui », « dans lui », « avec lui » que tout subsiste (He 1.3). Jésus participe ainsi à l’œuvre providentielle de Dieu en ce qui concerne le soutien de sa création et sa coopération avec elle.
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Si je respire aujourd’hui, c’est à cause de l’action de Christ, que je le croie ou non. Je respire « en Christ ». Sa médiation fait partie de la grâce commune. Et l’apôtre Paul va même plus loin : non seulement Christ a créé l’univers et le soutient, mais il le sauve également. En effet, le monde lui aussi avait été entraîné dans la chute suite à la faute d’Adam (Gn 3). D’après Paul, la création soupire et souffre les douleurs de l’enfantement en attendant le jour de sa pleine libération qui est liée, tout comme sa déchéance, à celle de l’homme (Rm 8.19-23). Christ est donc bel et bien, à travers son œuvre de Rédemption, le médiateur de la Création.
 
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Médiateur du Salut

Jésus est également médiateur de notre Salut. C’est ici que nous voyons l’importance de la Trinité dans cette notion de médiation du Christ. En effet, c’est en tant que deuxième personne de la Trinité que Christ est créateur/médiateur de la création. Et c’est aussi en cette qualité qu’il est notre sauveur. Mais pour sauver les hommes qui ont péché au travers d’Adam, Christ devait devenir un homme pour s’identifier pleinement à nous.
 
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C’est donc en tant que deuxième personne de la Trinité, par l’incarnation, que Christ devient notre médiateur (Jn 1.14 ; 1Tm 2.5).
Nous avons déjà dit que le médiateur est l’intermédiaire choisi pour mettre fin aux conflits. Depuis la Chute, il y avait conflit entre le Dieu saint et les hommes pécheurs. En devenant un simple homme, en mourant pour nos fautes à notre place, et parce que Jésus est aussi le Dieu saint, la colère de Dieu a été apaisée. C’est d’ailleurs pour montrer son acceptation de l’œuvre de son Fils que Dieu le Père l’a ressuscité (Ac 2 ; He 10.18).
 
Et pour tous ceux qui acceptent cela, Jésus est devenu le médiateur de leur salut. Il a réconcilié Dieu avec les hommes et les hommes avec Dieu. Cette « image de Dieu » dans l’homme a été restaurée. Christ est alors devenu le nouvel Adam, le chef de file d’une nouvelle humanité dont il est le représentant légal auprès du Père (Rm 5). Et c’est grâce à sa médiation en notre faveur que nous pouvons nous approcher sans crainte du trône de la grâce (He 4.16).


Les offices christiques

L’un des meilleurs moyens de représenter ce rôle de médiateur est d’aborder « les trois offices christiques ». Jean Calvin, en particulier, a mis en avant les offices de roi, de prêtre et de prophète (que nous retrouvons déjà dans l’Ancien Testament) avec l’œuvre de Christ. Lorsque nous lisons l’Institution de la vie chrétienne, nous pouvons nous rendre compte à quel point cette notion comptait pour Calvin.
En tant que roi, le Christ gouverne (Ep 1.20-23). Sa gouvernance n’est autre que sa médiation envers son peuple et envers le monde. Cela fait partie intégrante de sa fonction providentielle dont nous avons déjà parlé un peu plus haut.
 
En tant que prophète, Jésus est celui qui nous révèle la volonté de Dieu. Il est donc médiateur entre Dieu et les hommes par l’intermédiaire de sa Parole : de manière directe en son temps, et aujourd’hui par l’intermédiaire de la Bible qui est inspirée du Saint-Esprit. Ses disciples annoncent maintenant cette parole à la suite des apôtres.
 
Enfin en tant que grand-prêtre, Christ est celui qui intercède en permanence et pour l’éternité en notre faveur auprès du Père (Rm 8.34 ; He 7.25). Nous n’avons pas besoin de passer par un prêtre ou un pasteur pour avoir accès à Dieu, car le seul médiateur entre nous, c’est Christ. Pas besoin de présenter de sacrifice non plus : il est notre sacrifice substitutif.
Si l’on se demande ce que fait le Christ aujourd’hui, voilà la réponse !
 
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Conclusion


Christ est le médiateur d’une Alliance Nouvelle et plus excellente que celle dont les hommes de l’Ancienne Alliance étaient les médiateurs (He 8.6). Il est le médiateur d’une Nouvelle Création, qui confère à sa médiation un caractère eschatologique. Et cette médiation de la Nouvelle Création est double : elle est individuelle (Tt 3.5) mais aussi universelle (Mt 19.28 ; Ap 21.5). Christ n’est pas seulement venu réconcilier les hommes avec Dieu (et inversement), mais il est également venu restaurer toute chose.

Si cette œuvre est déjà en marche depuis sa venue et sa mort, elle sera pleinement effective le jour de son Retour. Cette réalité  devrait nous amener à élargir encore notre vision biblique du monde : en effet, si Christ n’est pas seulement notre médiateur personnel mais également le médiateur de la Création, alors nous devrions adopter une interprétation christocentrique de l’univers.

Cela implique deux choses pour nous. D’abord, nous pouvons nous approcher avec assurance du trône de la grâce. La médiation du Christ devrait nous motiver à toujours plus lire la Bible, prier et chercher la présence de Dieu. La médiation du Christ devrait nous amener à une relation plus profonde avec Dieu.

Ensuite, nous devrions faire preuve d’un zèle plus profond. Si nous sommes « image de Dieu » tout comme Christ l’est (Col 1.15), alors nous sommes appelés dans une certaine mesure à reproduire sa médiation dans notre vie de disciple, en paroles et en actes. Ainsi, nous devrions « dominer » – comme est censé le faire un être créé à « l’image de Dieu » (Gn 1.28) : nous engager dans notre société, dans notre travail, dans notre quartier, être présent pour notre voisinage. Et nous devrions également annoncer l’Évangile sans relâche. Les mandats culturels et missionnaires (qu’on ne peut séparer) sont nos moyens de médiation pour être conforme au Christ médiateur.

J’aimerais terminer par cette citation du grand théologien allemand Dietrich Bonhoeffer qui écrit dans son livre Le prix de la grâce : « Jésus-Christ n’est pas seulement le médiateur entre Dieu et les hommes, mais aussi entre les hommes et les hommes. Cela veut dire que quand je regarde quelqu’un, c’est avec les yeux du Christ que je devrais le regarder. Et quand quelqu’un me regarde, c’est Christ qu’il devrait voir ».

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Renaud Genevois est pasteur à l’Église Perspectives de Colmar. Avant cela, il a été enseignant dans des écoles chrétiennes durant plusieurs années. Il a étudié à l’Institut Biblique de Genève et à l’Institut Supérieur Protestant à Guebwiller. Il prépare actuellement un master de théologie à la Faculté Jean Calvin d’Aix-en-Provence. Renaud est allé plusieurs fois en Afrique enseigner dans un institut biblique et former des enseignants chrétiens. Il écrit régulièrement pour le Bon Combat.