La doctrine des Écritures saintes – Théologie Systématique #1
La plupart des ouvrages de théologie systématique du protestantisme débutent avec la doctrine des Écritures saintes. La raison est bien évidente lorsqu’on considère les fondements de la Réforme du 16e siècle. Illustrons ces fondements par la réponse de Martin Luther devant la Diète de Worms en 1521 :
« Puisque Votre Majesté Impériale et Vos Seigneuries me demandent une réponse nette, je vais vous la donner sans cornes et sans dents. Non! Si l’on ne me convainc par les témoignages de l’Écriture ou par des raisons décisives, car je ne crois ni au Pape ni aux conciles seuls, puisqu’il est clair comme le jour qu’ils ont souvent erré et qu’ils se sont contredits. Je suis dominé par les Saintes Écritures que j’ai citées, et ma conscience est liée par la Parole de Dieu. Je ne peux ni ne veux me rétracter en rien, car il dangereux d’agir contre sa propre conscience. Me voici, je ne puis autrement. Que Dieu me soit en aide! »
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C’est toute la conscience protestante qui fut définitivement liée par la Parole de Dieu. Dorénavant les doctrines et les pratiques de l’Église devaient avoir une justification biblique autrement elles furent rejetées. L’ancienneté d’une tradition seule ou l’autorité de l’Église seule sont insuffisantes aux yeux des protestants pour établir une doctrine. Dieu seul possède le pouvoir de lier la conscience, de déclarer la parfaite vérité, de définir sa volonté et de se révéler lui-même.
Les protestants croient que c’est par l’Écriture seule que Dieu a accompli tout cela. Sola Scriptura est donc la distinction la plus fondamentale entre les chrétiens protestants et les catholiques romains, car c’est d’elle que viennent toutes les autres divergences.
Pourquoi les ministres protestants peuvent-ils se marier et avoir des enfants? Parce que la Bible non seulement ne l’interdit pas, mais elle le recommande (1 Tm 3.2 ; Gn 2.18). Pourquoi les protestants ne prient-ils pas la vierge Marie? Parce que la Bible nous commande seulement de prier Dieu et aucun autre (Ex 20.3-6 ; Mt 6.10 ; Rm 1.25 ; 1 Tm 2.5 ; Ap 19.10). Pourquoi les protestants ne reconnaissent-ils pas le pape? Car cet office n’est pas biblique et que Jésus-Christ seul est le chef de son Église (Ep 1.22).
Il est donc normal que notre étude commence avec la doctrine de l’Écriture. Avant d’examiner quoi que ce soit sur la personne de Dieu ou le salut de l’homme, il est important d’examiner l’Écriture elle-même puisqu’elle est la source de tout ce que la théologie systématique doit affirmer.
On ne peut bâtir un édifice sans avoir d’abord posé un solide fondement. Les architectes de la confession de foi considéraient que l’Écriture elle-même est le fondement de tout l’édifice qu’elle érige, incluant la doctrine de l’Écriture. Nous verrons donc ce que la Bible dit d’elle-même.
Voici neuf questions par lesquelles nous tenterons de mieux comprendre ce que sont les Écritures saintes :
1. La Bible est-elle nécessaire pour connaître Dieu?
2. Dieu a-t-il cessé de se révéler?
3. Comment sait-on quels livres sont inspirés de Dieu?
4. Comment sommes-nous persuadés que la Bible est la Parole de Dieu?
5. La Bible est-elle suffisante à elle seule pour diriger l’Église et les croyants?
6. La Bible est-elle assez claire pour donner une connaissance certaine de Dieu?
7. La Bible est-elle infaillible et innerante?
8. La Bible peut-elle être interprétée de manière infaillible?
9. Comment peut-on régler tout débat religieux?
Articles d’introduction de cette série:
- Pourquoi présenter la théologie à partir d’une confession de foi?
- Quelle confession de foi pour baser notre théologie systématique?
CHAPITRE 1 – LES ÉCRITURES SAINTES
Par. 1 – L’Écriture sainte est la seule règle suffisante, certaine et infaillible de toute connaissance à salut, de foi et d’obéissance1. Quoique la lumière naturelle, les œuvres de la création et de la providence manifestent la bonté de Dieu, sa sagesse et sa puissance de façon à rendre les hommes inexcusables, elles ne sont pas suffisantes pour donner cette connaissance de Dieu et de sa volonté qui est nécessaire au salut2. C’est pourquoi il a plu à Dieu de se révéler à plusieurs reprises et de plusieurs manières et de faire connaître sa volonté à son Église3. Ensuite, pour que la vérité soit préservée et mieux propagée, et pour que l’Église soit d’autant plus sûrement établie et affermie, en face de la corruption de la chair, de la malice de Satan et du monde, il a plu au Seigneur de la mettre tout entière par écrit. Pour cela, l’Écriture sainte est indispensable, Dieu ayant cessé de manifester sa volonté à son peuple comme il l’avait fait jusque‑là4.
1. 2 Tm 3.15-17 ; Es 8.20 ; Lc 16.29, 31 ; Ep 2.20 2. Rm 1.19-21, 2.14-15 ;
Ps 19.2-4 3. Hé 1.1 4. Pr 22.19-21 ; Rm 15.4 ; 2 P 1.19-20
Par. 2 – L’appellation Écriture sainte ou Parole de Dieu écrite comprend tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, à savoir :
Livres de l’Ancien Testament
Livres du Nouveau Testament
Tous ces livres ont été inspirés par Dieu pour être la règle de foi et de la vie5.
5. 2 Tm 3.16
Par. 3 – Les livres communément appelés « apocryphes » ne sont pas d’inspiration divine. Par conséquent, ils ne font pas partie du Canon ou de la règle de l’Écriture et, de ce fait, n’ont aucune autorité dans l’Église de Dieu, et ne doivent pas être estimés ou utilisés différemment d’autres écrits humains6.
6. Lc 24.27, 44 ; Rm 3.2
Par. 4 – L’autorité de l’Écriture sainte, en raison de laquelle elle doit être crue, ne dépend pas du témoignage d’un homme ou d’une église, mais dépend entièrement de Dieu son auteur – qui est la Vérité même -. Elle doit donc être reçue parce qu’elle est la Parole de Dieu7.
7. 2 P 1.19-21 ; 2 Tm 3.16 ; 2 Th 2.13 ; 1 Jn 5.9
Par. 5 – Nous pouvons être mus et poussés par le témoignage de l’Église de Dieu à accorder aux Écritures saintes une haute estime toute empreinte de respect. De plus, le caractère divin du contenu, la portée pratique de son enseignement, la majesté de son style, la cohérence de toutes les parties, le but de l’ensemble – qui est de donner toute la gloire à Dieu -, le dévoilement qu’elle opère pleinement qu’il y a un unique moyen par lequel l’être humain puisse être sauvé, et de nombreuses autres qualités incomparables ‑ en un mot : sa totale perfection ‑ sont autant de raisons par lesquelles la Parole de Dieu s’authentifie sans l’ombre d’un doute. Néanmoins, malgré la valeur de ces arguments, notre assurance totale et notre conviction du caractère infaillible de sa vérité et de son autorité toute divine proviennent de l’œuvre intérieure du Saint-Esprit, rendant témoignage dans notre cœur par et avec la Parole8.
8. Jn 16.13, 14 ; 1 Co 2.10-12 ; 1 Jn 2.20, 27
Par. 6 – Tout le conseil de Dieu, c’est‑à‑dire toutes choses nécessaires à la gloire de Dieu, au salut de l’homme, à la foi et à la vie, est ou bien expressément consigné dans l’Écriture sainte ou y est contenu de façon nécessaire. Rien, à aucun moment, ne peut lui être ajouté ni par une nouvelle révélation de l’Esprit, ni par des traditions humaines9. Nous reconnaissons cependant que l’illumination intérieure de l’Esprit de Dieu est nécessaire pour une compréhension salvifique de ce qui est révélé dans la Parole10. De plus, certains aspects du culte de Dieu, et du gouvernement de l’église, communs aux activités et aux sociétés humaines, doivent être établis selon la lumière naturelle et la sagesse chrétienne, dans le respect des principes généraux de la Parole, qui doivent toujours être observés11.
9. 2 Tm 3.15-17 ; Ga 1.8-9 10. Jn 6.45 ; 1 Co 2.9-12 11. 1 Co 11.13-14, 14.26, 40
Par. 7 – Dans l’Écriture, tout n’est pas également évident, ni également clair pour tous12. Cependant, tout ce qu’il faut connaître, croire et observer en vue du salut, est si clairement exprimé et dévoilé dans tel ou tel passage de l’Écriture que non seulement l’érudit, mais même l’ignorant peut arriver à une compréhension suffisante par l’usage des moyens ordinaires13.
12. 2 P 3.16 13. Ps 19.8, 119.130
Par. 8 – L’Ancien Testament en hébreu (la langue de l’ancien peuple de Dieu14) et le Nouveau Testament en grec (une langue très en usage parmi les peuples à l’époque de sa rédaction) sont directement inspirés par Dieu, et par ses soins particuliers et sa providence gardés purs à travers les siècles ; ils sont donc authentiques et, dans tout débat religieux, l’Église doit y faire son dernier appel15. Or ces langues originales ne sont pas connues de tout le peuple de Dieu, qui a cependant droit et intérêt dans les Écritures, et qui a reçu l’ordre de les lire16 et sonder17 dans la crainte de Dieu. Aussi, les Écritures doivent‑elles être traduites dans la langue utilisée par chaque nation où elles pénètrent18, pour qu’elles soient pleinement répandues parmi tous et que tous puissent rendre à Dieu un culte qui lui soit agréable, et que par la patience et la consolation apportées par les Écritures, ils possèdent l’espérance19.
14. Rm 3.2 15. Es 8.20 16. Ac 15.15 17. Jn 5.39
18. 1 Co 14.6, 9, 11-12, 24, 28 19. Col 3.16
Par. 9 – La règle infaillible pour l’interprétation de l’Écriture, c’est l’Écriture elle‑même. Par conséquent, quand se pose une question au sujet du sens véritable et plein d’un passage de l’Écriture (sens qui est un et non multiple), la réponse doit être décidée sur la base d’autres passages qui parlent plus clairement de ce sujet20.
20. 2 P 1.20-21 ; Ac 15.15-16
Par. 10 – Le juge suprême par lequel tout débat religieux doit être réglé, et par lequel tous les décrets des conciles, toutes opinions des Pères, toutes doctrines humaines, toutes opinions particulières doivent être examinés et à la décision duquel nous devons nous en remettre, ne peut être rien d’autre que l’Écriture sainte que l’Esprit nous a communiquée. Notre foi se décide par l’Écriture ainsi communiquée21.
21. Mt 22.29, 31 ; Ep 2.20 ; Ac 28.23