Comprendre les 10 plaies d’Egypte #4 – Dé-création de l’Egypte
Dans les articles précédents, nous avons abordé le texte comme une polémique contre les idoles (typique des actes prophétiques dans l’AT), et nous avons vu que bien qu’il y ait un élément de polémique, “l’idole” visée était le Pharaon, divinisé dans la culture Egyptienne.
Dans cet article, nous allons aborder le texte comme une dé-création de l’Egypte, en écho inversé de la création en Genèse.
Dé-création de l’Egypte ?
Certains commentateurs voient dans ces calamités progressives une “dé-création” de l’Egypte, c’est à dire un parallèle inverse de la semaine de création.
Trois éléments font le lien :
- D’abord, dans les deux listes des 10 commandements, la raison donnée pour l’établissement du sabbat est tantôt les jours de création (Ex 20.1-17), tantôt la libération d’Egypte “d’une main puissante” (Deut 5.4-21), ce qui semble suggérer une équivalence ou une correspondance ;
- Puis en Apocalypse, 7 des 10 plaies sont reprises dans un contexte de destruction / re-création du monde et du peuple de Dieu ;
- Enfin, les 10 plaies font écho au récit de la Genèse, détruisant la création, renversant le mandat culturel et laissant l’Egypte dévastée.
Cependant, de même que pour l’approche des dieux égyptiens, les correspondances ne sont pas toutes évidentes et il est difficile de trouver un ordre cohérent (voir tableaux ci-dessus).
Étant donné le cadre de libération et les forts parallèles entre Moïse et Jésus, peut-être qu’il faut plus y voir une préfiguration de l’œuvre à venir qu’un écho du passé ?
D’ailleurs, les trois jours de ténèbres et la mort des premiers-nés (la Pâque juive) semblent pointer plus directement vers la culmination du ministère de Christ (la Pâque Chrétienne) que vers la semaine de création.
En fait, si les événements décrits peuvent être rapprochés de l’épisode en Egypte, ce n’est pas la seule origine biblique possible.
D’ailleurs l’Egypte n’est pas mentionnée directement et les allusions sont parfois assez vagues (notamment pour les grenouilles et pour la mort d’un tiers de l’humanité), laissant la porte ouverte pour d’autres interprétations : par exemple, la grenouille est aussi le symbole de l’arrogance futile à cause de son coassement.
Par ailleurs, certains signes précis trouvent un sens alternatif et contextuellement pertinent dans d’autres livres bibliques : les sauterelles (Jg 6.5, 7.12 ; Jr 46.23) et l’obscurité douloureuse (Mt 8.12, 22.13) notamment.
Ensuite, il est clair que l’écho le plus net des deux derniers signes se trouve dans le Nouveau Testament avec une obscurité qui dure trois heures (Mt 27.45 ; Mc 15.33 ; Lc 23.44) et le sacrifice de l’Agneau de Dieu (Jn 19.14-16 ; 1 Cor 5.7, ce dernier reprenant déjà un symbolisme plus ancien comme on le voit en Gn 22).
Conclusion
Il s’agirait donc plutôt d’une corrélation que d’un lien direct : les plaies d’Egypte, devenues emblématiques, ont constitué une sorte de typologie des jugements divins, qui sera reprise dans l’ensemble de la littérature prophétique à suivre, jusqu’à l’Apocalypse.
EH