Faut-il privilégier le Texte Massorétique à la Septante ?
Alors que LXX day, la journée en faveur de la Septante, avait lieu la semaine dernière (nous avions relayé un entretien de T. Muraoka à ce sujet dans le dernier En Lumière), j’aimerais revenir rapidement sur la question du texte de référence pour l’étude de l’Ancien Testament.
ECOUTEZ >> La version grecque de la Septante n’existe pas réellement
La semaine dernière, nous recevions cette question d’un lecteur qui nous suit régulièrement :
Du moment que la Septante est la version utilisée le plus souvent pour citer l’Ancien Testament dans le Nouveau Testament, pourquoi traduit-on l’Ancien Testament à partir du Texte Massorétique ? J’ai en effet toujours entendu dire que c’est l’Esprit Saint qui avait inspiré la rédaction des écritures. Par conséquent, n’est-ce pas l’Esprit saint qui a choisi de citer la Septante dans le NT ?
Pour rappel, si vous êtes néophytes, par « Texte Massorétique » l’on désigne généralement le Codex Leningradensis, un manuscrit daté de l’an 1010 qui sert de base à la Biblia Hebraica Stuttgartensia, l’édition de référence de la Bible hébraïque, ainsi qu’à la majeure partie des traductions modernes de l’Ancien Testament. La Septante, ou LXX, est une version, une traduction de la Bible en koinè grecque dont nous disposons de manuscrits plus anciens que le Codex Leningradensis.
L’argument de notre contact, qu’il étaye de nombreuses statistiques, peut être résumé ainsi :
(1) La version des Septante est la plus citée dans le Nouveau Testament
(2) Le Saint Esprit a inspiré la rédaction du Nouveau Testament
(3) Par conséquent le Saint Esprit a souverainement privilégié la Septante
(4) Par conséquent, les traducteurs devraient eux aussi privilégier ce texte.
Voici, en substance, les quelques éléments de réponse que je lui ai apportés :
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1- Un problème de critique textuelle
Oui, c’est bien de cela qu’il s’agit, et la critique textuelle ne peut pas s’embarrasser de tels raisonnements fidéistes. Le Saint Esprit n’a pas “choisi” la LXX, car (i) il y a tout de même d’autres versions citées dans le NT, et (ii) très souvent, les auteurs bibliques se limitent à des paraphrases, de sorte qu’il est impossible de déterminer si une version précise est envisagée.
D’autre part, il n’y a pas « une » Septante, comme Peter Williams l’explique dans le podcast mentionné en début d’article. Les manuscrits grecs dont nous disposons contiennent des variantes très significatives ! De telles variantes ou des paraphrases au sein de cette famille de manuscrits se retrouvent dans le Nouveau Testament.
Je n’ai pas reproduit ici les statistiques fournies par notre contact et je ne les ai pas vérifiées, mais je dois dire qu’elles me paraissent erronées et/ou orientées. De toute façon, le Saint Esprit, n’a pas “soufflé” la Bible sur le mode d’une dictée (dictate theory). Les auteurs inspirés ont très bien pu choisir un texte correspondant le mieux à leurs capacités linguistiques, ou peut être ont-ils parfois privilégié une version qui était bien connue de leurs lecteurs.
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