J’ai changé de point de vue au sujet du millénium, et voici pourquoi
Sam Storms croyait à un millénium futur littéral, une position que l’on appelle prémillénarisme (voir ici pour un survol des principales positions en la matière). Cet article raconte son parcours, il a été publié pour la première fois sur le site The Gospel Coalition le 9 janvier 2013 et traduit par LBC le 23 avril 2014 (cet article est une rediffusion).
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J’ai grandi dans une église de la Convention des Baptistes du Sud et j’ai pu à ce titre recevoir régulièrement des enseignements bibliques. Malgré cela, je ne me souviens pas avoir entendu quoi que ce soit à propos d’un “millenium“, et encore moins en ce qui concerne les différentes théories relatives à sa signification et à la deuxième venue de Christ.
Comme de nombreuses personnes de ma génération, j’ai étudié l’eschatologie pour la première fois durant l’été 1970, en lisant Late Great Planet Earth, de Hal Lindey.
Peu après, j’ai acheté une Bible d’étude Scofield et j’ai commencé à dévorer ses commentaires et à les surligner, bien plus passionnément d’ailleurs que le texte biblique sur lequel portaient les commentaires.
Aussi loin que je me souvienne, personne ne m’avait jamais proposé un autre point de vue que le dispensationalisme pré-tribulationiste et prémillénariste de Scofield. Quiconque daignait remettre cela en question était automatiquement suspecté de ne pas croire en l’innerrance des Ecritures.
Questionnements au sujet du prémillénarisme
Suite à l’obtention de ma licence à l’université d’Oklahoma en 1973, j’ai entrepris des études au séminaire de théologie de Dallas (DTS).
Mes enseignants étaient de grands connaisseurs du prémillénarisme dispensationaliste.
Juste pour mentionner les plus connus: John Walvoord (alors président de DTS), Charles Ryrie (auteur de Dispensationalisme Hier et Aujourd’hui et de The Ryrie Study Bible), et J. Dwight Pentecost (auteur de l’oeuvre la plus influente sur le sujet à cette époque : Things to Come).
Toute autre perspective que celle du prémillénarisme dispensationaliste telle que définie dans l’ouvrage de théologie systématique de L.S. Chafer et enseigné dans de nombreux cours de DTS, était considérée comme non-évangélique.
Les seules choses que je me souviens avoir entendues à propos de l’amillénarisme, par exemple, était qu’il s’agit d’un point de vue dangereux car populaire parmi les théologiens libéraux qui ne prenaient pas les Saintes Ecritures au sérieux.
En 1973, le livre The Church and the Tribulation de Robert Gundry fut publié. Cette même année, je commençais mes études à Dallas, et c’était comme si une bombe atomique théologique était tombée sur le campus.
Tout le monde le lisait, et beaucoup étaient attirés vers sa perspective post-tribulationiste sur la période de l’enlèvement.
Les débats dans les salles de classe, les cafétérias, voire n’importe où, étaient abondants et animés.
Certains se sont alors procuré une copie de la thèse de Daniel Fuller dans laquelle il critiquait l’herméneutique du dispensationnalisme, et de plus en plus d’huile était jetée sur le feu.
Suite à l’obtention de mon Master à DTS en 1977, je me suis immédiatement plongé dans l’étude des différents aspects et écoles de pensée escathologique.
Lors des années qui suivirent, les deux ouvrages qui m’ont le plus influencé et persuadé sont : The Presence of the Future: The Eschatology of Biblical Realism de George Eldon Ladd (lui-même prémillénariste historique), et The Bible and the Future de l’amillénariste Anthony Hoekema.
Il est important de noter que la distinction entre Israël et l’Eglise, sur laquelle le dispensationalisme s’appuie largement, ne pouvait soutenir les assauts implacables de Ladd ou Hoekema.
Mon péché impardonnable
Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que Ladd, Hoekema, et Gundry, ainsi que quelques autres, me persuadent qu’il n’y a aucun fondement biblique en faveur d’un enlèvement pré-tribulationiste de l’Eglise.
Pour beaucoup, c’était déjà suffisamment grave.
Je me souviens parfaitement de l’horreur (croyez-moi, “horreur“ est tout sauf un terme exagéré pour décrire les réaction que j’ai reçues) de mon églises, lorsque j’ai fait savoir que je ne pouvais plus embrasser la doctrine d’un enlèvement de l’Eglise avant la Grande Tribulation,
Plusieurs furent rapidement convaincus que j’étais engagé sur le chemin qui mène à la théologie libérale !
Et lorsque dans le débuts des années 1980 j’ai abandonné le prémillénarisme sous toutes ses formes, la réaction publique était telle qu’on aurait juré que j’avais commis le péché impardonnable.
Je ne suis certes pas en train de dire que la totalité ou majorité des prémillénaristes dispensationalistes réagissent encore de cette manière aujourd’hui (je prie et espère que très peu agissent ainsi). L’atmosphère dans les années 1970 et 1980 n’était pas favorable à ceux qui quittaient la croyance escathologique acceptée.
Mon rejet du prémillénarisme et mon adoption de l’amillénarisme a été progressif et est le résultat de deux découvertes que j’ai faites en étudiant les Ecritures.
Tout d’abord, je me suis dévoué à une inspection minutieuse de ce que le Nouveau Testament dit sur les événements qui surviennent au moment de la deuxième venue de Christ (ou “parousie“).
Ce que j’ai trouvé est un témoignage récurent de ce qui se finirait ou commencerait lors du retour du Seigneur sur la terre. Le péché dans la vie des enfants de Dieu, la corruption de l’ensemble de la création, et la mort physique allaient se terminer au moment même de l’apparition de Jésus Christ.
Bien plus, la résurrection des corps, le jugement final, et l’inauguration des Nouveaux Cieux et de la Nouvelle Terre allaient immédiatement s’ensuivre.
En quoi ces choses sont un problème Pourquoi est-ce un problème pour les prémillénaristes ? Voilà une excellente question.
Quelques défis scripturaires pour les prémillénaristes
Si vous êtes prémillénariste, dispensationaliste ou non, il y a plusieurs choses que vous devez croire:
- Vous devez nécessairement croire que la mort physique continuera d’exister après le moment de la deuxième venue de Christ.
– - Vous devez nécessairement croire que même après la deuxième venue de Christ, la création toute entière continuera d’être impactée par la malédiction imposée par la chute d’Adam.
– - Vous devez nécessairement croire que les Nouveaux Cieux et la Nouvelle Terre ne seront établis que 1000 ans après le retour de Christ.
– - Vous devez nécessairement croire que les incroyants auront toujours l’opportunité d’être sauvés par Christ, après son retour, et ce pendant au moins 1000 ans.
– - Vous devez nécessairement croire que les incroyants ne ressusciteront que plus de 1000 ans après le retour de Christ.
– - Vous devez nécessairement croire que les incroyants ne seront finalement jugés et jetés dans le feu éternel que plus de 1000 ans après le retour de Christ.
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“Et quoi croire en ces choses est problématique ?“ pourrait demander un prémillénariste.
Ce qui est problématique, c’est que toutes ces choses auxquelles les prémillénaristes doivent croire (à cause de la façon dont ils interprètent les Ecritures), est explicitement contredit par le Nouveau Testament.
En d’autres termes, durant mon étude sur la seconde venue de Christ, j’ai découvert que, contrairement aux croyances que le prémillénarisme requiert :
- la mort est détruite et engloutie dans la victoire au moment même de second retour de Christ (1 Corinthiens 15:24-26, 50-58),
– - la création est délivrée de la malédiction lors de la parousie (Romains 8:18-25, comp. 1 Jean 3:2, etc..),
– - les Nouveaux Cieux et la Nouvelle Terre sont immédiatement créés à la suite de la parousie (2 Pierre 3:10ss ; comp. 1 Pierre 1:13 et 2 Pierre 3:12-13, etc…),
– - la possibilité de recevoir Christ s’achève à la parousie, et la résurrection finale tout comme le jugement éternel des incroyants arriveront lors de la parousie (Matt. 24:36-44 ; Jean 5:28-29 ; Daniel 12:2 ; Actes 24:15, etc…)
Pour exprimer les choses plus simplement, les descriptions que le Nouveau Testament fait de la seconde venue du Christ m’ont forcé à conclure qu’une ère du millenium établie à la suite du retour de Christ, telle que proposé par le prémillénarisme, était impossible.
Le second facteur qui m’a amené à passer du prémillénarisme à l’amillénarisme est une étude sur Apocalypse 20, le texte souvent cité par les prémillénaristes comme soutenant leur théorie.
Contrairement à ce qu’on m’avait enseigné et que j’avais longtemps cru, j’ai vu en Apocalypse 20 un soutien puissant et inébranlable pour la cause amillénariste.
Ma recherche eschatologique et ma défense biblique de l’amillénarisme peuvent désormais être examinés plus en détail dans mon livre Kingdom Come: The Amillenial Alternative.
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– Sam Storms
Pasteur de l’église Bridgeway à Oklahoma City, USA
Pour aller plus loin :
Plusieurs articles relatifs à l’eschatologie devraient être postés sur Le Bon Combat, dans l’avenir. Voici quelques ouvrages qui pourraient vous intéresser :
- Je pensais que l’excellent petit fascicule de Frédéric Bühler, Retour de Christ et Millenium, était épuisé. Pas du tout : les éditions Excelsis en ont encore un petit stock. Ce petit livret, pas cher, constitue un bon survol avec les défenseurs des principales approches et les forces et faiblesses de chaque position.
- Le commentaire de l’Apocalypse de William Hendriksen, Plus que Vainqueurs, expose le texte dans une perspective amillénariste.
- Si vous maitrisez l’anglais, je ne peux que vous recommander la lecture de l’ouvrage de Sam Storms, référencé dans l’article, mais également celle du commentaire de l’Apocalypse de Greg Beale, dans la série NIGTC.