Article de Michael J. Kruger, publié initialement sur son blog le 2 décembre 2021 (article original ici). Traduction : Daniel Orchanian.

**

Le grand prédicateur baptiste du XIXe siècle, C.H. Spurgeon, a un jour confessé ses doutes quant à l’existence de Dieu :

« Tout à coup, une pensée m’a traversé l’esprit – pensée que je détestais mais qui m’était impossible à vaincre – qu’il n’y avait pas de Dieu, pas de Christ, pas de ciel, pas d’enfer, et que toutes mes prières n’étaient qu’une farce. J’aurais aussi bien pu siffler au vent ou parler aux vagues rugissantes. »

La citation ci-dessus nous rappelle que presque tous les chrétiens, même ceux qui semblent forts et confiants, sont confrontés à des périodes de doute au sujet de leur foi. Il arrive même parfois que ces doutes évoluent vers une forme de crise. Même Spurgeon admettait que ses doutes étaient difficiles à vaincre.

Alors, comment gérer ces doutes lorsqu’ils surviennent ? Ou comment aider les autres quand ils admettent avoir des difficultés avec ce qu’ils croient ? Voici cinq vérités qui peuvent peut-être nous aider à être plus prudents et plus compatissants dans de telles situations.

1- Le doute est normal

Commençons par le commencement : le doute est un élément normal de la vie chrétienne. Non seulement les Écritures sont remplies de cas où les gens luttent pour croire, mais nous voyons cette même réalité dans l’histoire de l’Église. Malgré notre propension à élever les personnages illustres de l’histoire de l’Église au rang de célébrités, ceux-ci ont souvent eu des luttes intenses en coulisses (il suffit de lire l’histoire de Martin Luther).

Ainsi, douter ne signifie pas rejeter le christianisme. Douter ne fait pas de quelqu’un un ennemi de l’Église. Au contraire, Os Guinness nous rappelle que le doute est une forme d’hésitation ; c’est avoir « deux avis » sur quelque chose (voir Au-delà du doute). C’est être comme le père inquiet en Marc 9.24 « Je crois ! viens au secours de mon incrédulité ! »

Malheureusement, l’Église n’a pas toujours reconnu cette réalité. On nous dit parfois que les bons chrétiens ne sont jamais en conflit avec ce qu’ils croient. Ceux qui se posent des questions ont honte et pensent être des chrétiens de seconde zone, et sont même parfois traités avec suspicion. Ce genre d’attitude a causé d’immenses dégâts sur le plan spirituel, et nous devons faire mieux.

2- Le Christ était compatissant envers ceux qui étaient sceptiques

Il n’est pas facile d’être tiraillé entre la croyance et l’incrédulité. Mais plutôt que de mépriser et d’humilier ces personnes, soyez encouragé par le fait que Christ a eu de la compassion pour elles. Il a été patient avec ceux qui doutaient. Il n’a pas humilié Thomas, mais l’a invité à voir la vérité plus clairement : « Avance ici ton doigt» (Jean 20.27). Nous devons nous rappeler le caractère gracieux de Dieu lui-même : « Il ne brisera point le roseau cassé, et il n’éteindra point la mèche qui brûle encore » (Matt 12.20/Es 42.3).

L’Église a beaucoup à apprendre dans ce domaine. Dans toutes les conversations culturelles tournant autour de la « déconstruction », il y a un manque cruel de compassion. Souvent, on a affaire à des personnes blessées qui ont besoin d’une réponse gracieuse, et non d’une réprimande sévère.

3- Le doute n’est pas une vertu à cultiver

Si l’Église a besoin de plus de compassion envers ceux qui doutent, il existe aussi le danger opposé. Certaines voix dans l’Église d’aujourd’hui présentent presque le doute comme s’il s’agissait d’une qualité admirable que les chrétiens devraient embrasser. Le problème, nous dit-on, est que les chrétiens sont beaucoup trop sûrs de ce qu’ils croient. La certitude serait le réel problème.

Il y a là un élément de vérité. Nous devons nous rappeler que toutes les doctrines ne sont pas présentées avec le même degré de clarté dans les Écritures, et nous ne devrions donc pas leur accorder à toutes la même certitude. Néanmoins, lorsqu’il s’agit des croyances fondamentales du christianisme, le doute peut devenir un véritable danger s’il n’est pas maîtrisé. Jésus nous dit clairement d’avoir foi et de ne pas douter (cf. Matt 21.21, Colombe). Et Jacques nous rappelle : « qu’il la demande avec foi, sans douter ; car celui qui doute est semblable au flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d’autre » (Jacques 1.6).

En bref, le doute peut être une entrave à notre foi s’il n’est pas contrôlé. Nous devons le combattre.

4- Le doute a de nombreuses causes différentes

Malheureusement, de nombreux chrétiens supposent que les sceptiques doivent avoir une sorte de déficience intellectuelle. Peut-être ne disposent-ils pas de suffisamment de faits. Peut-être n’ont-ils pas entendu tous les arguments. Ou peut-être qu’ils ne sont tout simplement pas très intelligents. Ce genre de sentiments est profondément problématique. Bien sûr, certains sceptiques ne connaissent peut-être pas les réponses à leurs questions. Mais de nombreux sceptiques ont fait les recherches intellectuelles et luttent encore pour croire. Ne soyons pas condescendants au point de penser que de telles choses sont toujours résolues en donnant aux gens un autre livre à lire.

En outre, certaines personnes doutent du christianisme pour des raisons morales. Par exemple, la dernière décennie a révélé que l’Église a encore beaucoup de travail à faire dans les domaines des abus sexuels et des abus spirituels. Certaines personnes doutent parce qu’elles ont été témoins de l’horrible réalité des abus dans l’Église et de la réponse trop souvent mitigée à ces abus. Il est tout à fait compréhensible que ces personnes se demandent si Dieu est réel, si l’Église est une bonne institution, ou si le système chrétien tout entier est digne de leur confiance.

Plutôt que de mépriser ceux qui doutent pour ces raisons, l’Église ferait peut-être mieux d’adopter une attitude d’humilité et de compassion. Nous devrions nous efforcer de comprendre ce que ces personnes ont souffert, et d’apprendre comment l’Église pourrait avoir besoin de grandir et de changer.

5- Il existe plusieurs solutions différentes au doute

Si nous avons à combattre nos doutes, il existe de nombreuses façons de le faire. Si les doutes sont effectivement d’ordre intellectuel, il peut être utile de faire des études et des recherches sérieuses. Mais il existe d’autres étapes importantes pour faire face au doute. Tim Keller a suggéré avec pertinence que nous devrions apprendre à « douter de nos doutes ». Cela signifie que nous ne nous contentons pas juste de remettre en question la vérité de nos croyances chrétiennes, mais que nous apprenons à remettre en question la vérité de ce qui tente de remplacer nos croyances chrétiennes. Si nous doutons du christianisme à cause de l’évolution, nous devrions prendre le temps de remettre en question la véracité de l’évolution et nous demander si elle est vraiment ce qu’elle prétend être.

Une dernière réflexion sur la gestion du doute. C’est ce que j’appelle mon « conseil de film d’horreur » (j’adore les films d’horreur). Dans ce genre de films, le protagoniste fait toujours la même erreur : il s’égare seul dans le noir. A ce moment, le public crie « Ne fais pas ça ! ». Ils savent que le pire endroit où se trouver est dans l’obscurité, et seul.

Il en va de même pour les questions spirituelles. Lorsque vous faites face au doute, ne partez pas seul et dans le noir. Au contraire, restez dans le groupe et demeurez dans la lumière. Faites face à ces défis au sein d’une communauté chrétienne solide qui peut vous apporter soutien et encouragement.

Après tout, c’est à cela que sert le corps du Christ : « Deux valent mieux qu’un […] car, s’ils tombent, l’un relève son compagnon ; mais malheur à celui qui est seul et qui tombe, sans avoir un second pour le relever » (Eccles. 4.9-10).

Ces ressources pourraient vous intéresser :

• Voici comment le diable vous fait douter de la bonté de Dieu
• Si je doute sans cesse de mon salut, est-ce une indication que je ne suis pas sauvé ?
• 6 manières de prier quand vous êtes tenté