La doctrine de la justification – Théologie systématique #11
La doctrine de la justification est l’un des principaux articles de la foi chrétienne sur lequel l’Église tient ou s’écroule. Un puritain disait que la justification est la source de l’eau de la vie, corrompre cette source avec le poison de l’erreur c’est commettre une faute damnable. La doctrine de la justification est sans aucun doute le trait le plus distinctif de la théologie protestante. Elle fut le cœur et le moteur de la Réforme, en particulier celle de Luther.
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Nous pourrions croire que la justification ne constitua pas une grosse controverse au sein de l’assemblée de Westminster qui rédigea la plus grande partie des articles de foi que nous nous apprêtons à étudier. Bien que plusieurs aspects de cette doctrine firent consensus parmi les théologiens de cette assemblée, les procès-verbaux font état de longues délibérations sur la question de l’antinomisme.
Certains théologiens craignaient l’effet pervers que pourrait avoir la doctrine de l’imputation de l’obéissance active du Christ en rendant caduque l’obéissance des chrétiens. Alors pour éviter l’antinomisme, certains rejetaient cette imputation tandis que d’autres théologiens de l’assemblée l’affirmaient. Cette tension fit que l’imputation de l’obéissance active de Christ ne fut pas affirmée explicitement dans la Confession de foi de Westminster tandis qu’elle le fut dans ses révisions par les congrégationalistes (Déclaration de Savoie 1658) et par les baptistes (Confession de foi baptiste de Londres de 1689).
La confession des baptistes combat clairement sur deux fronts pour défendre la doctrine biblique de la justification. D’un côté elle s’oppose à la doctrine catholique romaine telle qu’exprimée dans les canons du Concile de Trente (1542-1563). De l’autre côté, elle combat l’antinomisme des tenants de la justification éternelle. La confession présente une articulation mature et classique de la justification par la foi seule et de l’imputation de l’obéissance active et passive du Christ. Le tout est présenté de manière pastorale en répondant aux principales objections contre la justification sola fide et sola gratia.
Le chapitre 11 de notre confession de foi compte six paragraphes à partir desquels nous répondrons à six questions :
1. Comment un pécheur peut-il être trouvé juste devant un Dieu saint?
2. Sommes-nous justifiés uniquement par la foi en Jésus-Christ?
3. Sommes-nous justifiés uniquement par la mort de Christ?
4. Sommes-nous justifiés uniquement par l’élection en Christ?
5. Mes péchés affectent-ils ma justification?
6. Comment les hommes étaient-ils justifiés sous l’Ancienne Alliance?
CHAPITRE 11 – LA JUSTIFICATION
Par. 1 – Ceux que Dieu a efficacement appelés, il les a aussi gratuitement justifiés, non en leur infusant la justice, mais en pardonnant leurs péchés, et en considérant et recevant leurs personnes comme justes, non en raison de quelque chose qui aurait été faite en eux, ou qu’ils auraient faite, mais eu égard au Christ seul. Ce n’est pas en leur imputant la foi elle‑même pour leur justification, ni leur acte de croire, ou quelque autre obéissance évangélique; ce qui est imputé, c’est l’obéissance active du
Christ à toute la loi, et son obéissance passive dans sa mort en vue de leur seule et entière justification par la foi, laquelle foi ils ne tiennent pas d’eux‑mêmes : c’est le don de Dieu.
1. Rm 3.24, 8.30 2. Rm 4.5-8 ; Ep 1.7 3. 1 Co 1.30-31 ; Rm 5.17-19
4. Ph 3.8-9 ; Ep 2.8-10 5. Jn 1.12 ; Rm 5.17
Par. 2 – La foi qui reçoit le Christ et sa justice et s’en remet à lui est le seul moyen d’approprier la justification. Elle ne se trouve cependant pas seule dans la personne justifiée, mais s’accompagne de toutes les autres grâces salutaires. Ce n’est pas une foi morte, mais une foi qui œuvre par l’amour.
6. Rm 3.28 7. Ga 5.6 ; Jc 2.17, 22, 26
Par. 3 – Par son obéissance et sa mort, le Christ a entièrement payé la dette de tous ceux qui sont justifiés ; par le sacrifice qu’il a fait de lui‑même et par son sang versé sur la croix, il a encouru à leur place le châtiment qui leur revenait et il a pleinement satisfait la justice de Dieu en leur faveur. Cependant, pour autant qu’il leur a été donné par le Père, et que son obéissance et sa satisfaction ont été reçues à la place des leurs, toutes deux gratuitement et sans qu’ils y soient pour rien, leur justification est due à la pure grâce de Dieu, afin que par la justification des pécheurs, la rigoureuse justice de Dieu et son abondante grâce puissent toutes deux être glorifiées.
8. Hé 10.14 ; 1 P 1.18-19 ; Es 53.5-6 9. Rm 8.32 ; 2 Co 5.21
10. Rm 3.26 ; Ep 1.6-7, 2.7
Par. 4 – De toute éternité, Dieu a décrété de justifier tous les élus, et au temps fixé, Christ est mort pour leurs péchés, et il est ressuscité pour leur justification. Néanmoins, ils ne sont pas justifiés personnellement jusqu’à ce que le Saint-Esprit, en temps voulu, leur applique de fait le Christ.
11. Ga 3.8 ; 1 P 1.2 ; 1 Tm 2.6 12. Rm 4.25 13. Col 1.21-22 ; Tt 3.4-7
Par. 5 – Dieu continue de pardonner les péchés de ceux qui sont justifiés ; bien que ces derniers ne puissent jamais déchoir de l’état de justification, ils peuvent néanmoins, par leurs péchés, encourir le déplaisir paternel de Dieu. Dans cette condition, ils ne retrouvent généralement la lumière de sa face qu’après s’être humiliés, avoir confessé leurs péchés, imploré le pardon de Dieu et renouvelé leur foi et leur repentance.
14. Mt 6.12 ; 1 Jn 1.7, 9 15. Jn 10.28 16. Ps 89.31-33
17. Ps 32.5 ; Ps 51 ; Mt 26.75
Par. 6 – La justification des croyants sous l’Ancienne Alliance était, sous tous ces rapports, la même que celle des croyants sous la Nouvelle Alliance.
18. Ga 3.9 ; Rm 4.22-24