Pourquoi la date de Pâques est-elle si… fluctuante ?
L’Église célèbre Pâques… le dimanche qui suit la première pleine lune du printemps ! Un véritable casse-tête qui a posé de nombreux problèmes de calcul tout au long de l’histoire de l’Église, d’une part à cause des controverses qui ont précédé l’établissement de cette règle, mais également en raison de l’adoption du calendrier grégorien à la fin du XVIe siècle.
Comment en est-on arrivé là ?
Tout d’abord, rappelons que le casse-tête de la date de Pâques est probablement antérieur à l’ère chrétienne : il semble qu’au premier siècle, la Pâque et la Fête des pains sans levain avaient lieu le même jour, ce qui soulève la question de l’exactitude du jour de la crucifixion (écoutez ce podcast pour une discussion approfondie sur ce point).
Notons ensuite que cette problématique calendaire est à la base de l’une des plus anciennes controverses post-apostolique : la querelle quartodécimaine (du latin quarta decima, « quatorze »).
« Quartodécimanisme »
Au deuxième siècle ap. J.C., la fête de Pâques était précédée par un jeûne qui prenait fin le soir du repas pascal. Les Églises de Jérusalem et d’Asie Mineure prenaient ce repas conformément au calendrier juif, soit le 14e jour du mois de Nisan (Lv 23.5). En conséquence, la fête de Pâques était régulièrement célébrée en pleine semaine. Mais les Églises de Rome et, selon Eusèbe , « toutes les autres Églises du monde », estimaient que le jeûne devait se terminer le jour de la résurrection de Jésus, soit un dimanche.
Irénée de Lyon rapporte que ces divergences liturgiques existaient depuis le début du IIe siècle et que Polycarpe de Smyrne, un disciple de l’apôtre Jean, observait la pratique quartodécimaine sans que cela n’occasionne la moindre dissension avec Anicet, l’évêque de Rome.
La dispute
C’est à la fin du IIe siècle que la controverse éclate, lorsque Victor, évêque de Rome, entreprend d’excommunier tous les tenants de la position quartodécimaine. Selon Eusèbe (Histoire Ecclésiastique, V, xxiii-xxv), les Églises d’Asie refusèrent d’obtempérer, et il fallut toute l’influence d’Irénée pour éviter le schisme.
De toute évidence, la pratique de la célébration dominicale était la plus répandue dans l’Église du IIe siècle, et elle s’est finalement imposée par une décision conciliaire.
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Le concile de Nicée
En 325, le premier concile oecuménique de Nicée établit deux règles pour régler la controverse quartodécimaine : (i) l’indépendance vis-à-vis du calendrier juif pour établir la date de Pâques et (ii) l’uniformité mondiale en la matière.
Le concile ordonne de suivre la pratique alors en cours dans les Églises de Rome et d’Alexandrie, mais il ne fournit pas de méthode de calcul précise. En conséquence, les divergences perdureront donc tout au long de l’histoire, même si la position quartodécimaine est marginale depuis le IVe siècle. Aujourd’hui, toutes les Églises ou presque célèbrent Pâques un dimanche.
Le calendrier grégorien
L’adoption du calendrier grégorien par l’Église catholique romaine (1582) est la dernière étape de ce grand « désaccord pascal ». En effet, l’Église orthodoxe orientale et la plupart des autres Église d’Orient continuent de s’appuyer sur le calendrier julien, ce qui génère les différences de dates que nous observons aujourd’hui.
En 1997, le Conseil Oecuménique des Églises a proposé d’uniformiser une fois pour toutes le calcul de la date de Pâques : la fête devrait être célébrée partout le premier dimanche suivant la première pleine lune après l’équinoxe de printemps, tel que déterminé à partir du méridien de Jérusalem. Le COE proposait que cette réforme soit mise en œuvre dès 2001, puisque les Pâques orientales et occidentales tombaient à la même date cette année là.
Mais cette réforme n’a jamais été mise en œuvre…
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