Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un esprit nouveau. Je retirerai de votre corps le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair.
(Ez. 36:26)

Commentaire fort pertinent de Daniel Block sur ce passage d’Ézéchiel 36, qu’il introduit ainsi :

Nombreux sont ceux qui croient que le rôle de l’Esprit de Yahvé dans la vie du croyant de l’Ancienne Alliance était fondamentalement différent de celui qu’il joue dans le Nouveau Testament et dans la vie du chrétien aujourd’hui. L’idée que, dans l’Israël ancien, le Saint-Esprit venait sur certaines personnes pour les qualifier en vue de tâches spécifiques, mais que c’est seulement dans l’Église actuelle qu’il habite le croyant, est très courante.

Cette manière de penser est erronée pour les raisons suivantes, explique Block :

(1) Cette façon de voir ne fait pas de distinction entre les dons spirituels et l’infusion de l’Esprit. Tant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau, l’Esprit reçu repose sur les individus afin de les qualifier pour certaines tâches.

(2) Ce point de vue refuse de reconnaître la continuité ecclésiale entre les deux Testaments. Croyant que les Israélites étaient reçus dans la communauté de la foi par leur obéissance à la Torah, c’est à dire leur fidélité à la loi, bien des personnes ne reconnaissent pas que la religion israélite était dès le départ une religion du cœur.  L’appel de Jérémie à la circoncision du cœur (Jérémie 4:4) n’était aucunement une innovation mais un rappel de Deutéronome 10:16 et surtout de Deutéronome 30:6 (la loi), textes dont l’influence pèse fortement sur le passage d’Ézéchiel 36:26 (“je mettrai mon Esprit en vous”) Mais c’est un verset de la Genèse (2:7) qui fournit à Ézéchiel le modèle pour comprendre la puissance animatrice de l’Esprit de Yahvé (Ézéchiel 37) […]. Comme ce sera le cas dans la nouvelle alliance, la régénération dans l’Ancienne Alliance ne provenait pas des oeuvres de justice du croyant mais de l’infusion par Yahvé de son Esprit dans l’individu.

(3) Il s’agit également d’un oubli des enseignements du Psaume 51:12–13 où nous voyons David craindre que l’Esprit de Dieu ne lui soit enlevé (voyez également Ésaïe 63:10) et qu’il soit rejeté. Son unique espoir se trouve dans ce dont parle Ézéchiel ici : cet accueil gracieux du pécheur par Dieu, ainsi que la présence de Dieu en lui par son Esprit (rûaḥ).

(4) En Jean 3:5–8, Jésus reproche à Nicodème son ignorance quant à la réalité de la régénération dont parle Ézéchiel. Dans ce passage de Jean, Jésus n’introduit aucunement une idée nouvelle, mais se réfère à ce texte d’Ézéchiel 36 que tout rabbin bien instruit dans la Tanak devait parfaitement connaître.

Block conclut avec ces paroles fort éclairantes :

“Ézéchiel était certainement conscient de la théologie qui sous-tendait des textes tels que le Psaume 51. Qui plus est, cette déduction [concernant la profanation du nom de Dieu par Israël] reflète le décalage fondamental entre la désignation idéaliste de son propre peuple comme le peuple de Yahvé, et la réalité qu’il observait parmi ses compatriotes.

Le problème pour lui n’était pas “dispensationnel”, c’est-à-dire l’absence du Saint-Esprit à cette époque de l’histoire de la rédemption, mais “ecclésial”. Cette transformation annoncée n’allait pas se produire l’échelle de la nation. On parle ici d’étendue et non pas de qualité.

En Ézéchiel 36:25-29 [la régénération du “reste” d’Israël], Ézékiel anticipe le jour où les frontières de l’Israël physique correspondront typologiquement aux frontières du peuple spirituel de Dieu. Mais comme le montre Ézéchiel 37:1-14 [la “résurrection” des ossements], ceci ne pourra se produire que par l’intervention directe de Dieu, référence à l’infusion par Yahvé de sa propre vie dans un peuple spirituellement mort.”

Citation tirée de l’excellent ouvrage de Jean-Marc Berthoud, L’Alliance de Dieu à Travers l’Écriture Sainte, Une Théologie Biblique, p. 310-311