Calvinistes et non-calvinistes : une cohabitation possible
J’ai récemment reçu ma copie de l’ouvrage édité par Malcolm B. Yarnell, The Anabaptists and Contemporary Baptists, Restoring New Testament Christianity.
Il s’agit d’une série d’articles académiques écrits en l’honneur de Paige Patterson, le président de Southwestern Baptist Theological Seminary.
Comme vous le savez peut-être, deux grandes tendance coexistent dans la Convention des Baptistes du Sud, l’un des plus gros mouvements de professants au monde (16,5 millions de membres) :
- Certains adhèrent au cinq points du calvinisme, on parle alors de baptistes réformés ou de baptistes particuliers (en référence à l’expiation, qui ne serait effectuée que pour les élus)
- D’autre rejettent cette approche, et optent pour un modèle amyraldien, moliniste, ou encore franchement arminien. (1) On parle alors de baptistes généraux (toujours en référence à l’étendue de l’expiation, qui serait accomplie pour tous).
Cette cohabitation ne se fait pas sans quelques tensions, mais j’ai trouvé admirable que la préface de l’ouvrage soit réalisée par Albert Mohler, le président de Southern Seminary.
En effet, Mohler est réputé pour son calvinisme intransigeant, et ses désaccords avec Patterson (un arminien, même s’il s’en défend!!) sont notoires et ont souvent eu lieu publiquement.
Il n’empêche que Patterson et Mohler ne cachent pas leur amitié mutuelle.
J’ai trouvé dans cette préface un modèle d’irénisme, mais également une expression claire et simple de ma propre position.
Je vous en livre ici un extrait :
“Je suis honoré d’avoir le privilège d’écrire cette préface, mais ma contribution pourrait sembler incongrue à certains lecteurs.
Ils connaissent l’amour, le respect et l’amitié que j’ai pour Paige Patterson, mais ils vont se gratter la tête à l’idée qu’un calviniste engagé loue l’homme qui préférerait de loin l’influence des anabaptistes dans notre milieu.
Je suis un baptiste et même un Baptiste du Sud reconnaissant. Je suis redevable à la Réforme radicale à un point tel qu’on ne saurait décrire. Bien que je sois réformé dans ma sotériologie, je reconnais que mon ecclésiologie définitivement baptiste a beaucoup plus en commun avec celle des anabaptistes.
Je me joins aux anabaptistes dans leur insistance sur le baptême des croyants seuls et la nécessité de la confession de foi personnelle en Christ. Je rejette la compréhension de Calvin en ce qui concerne l’Eglise et l’état, et, sans m’en excuser, je me tiens aux côtés de ceux qui sont morts par la main de ceux qui ont utilisé l’état comme instrument de l’Eglise, ou l’Eglise comme instrument de l’Etat.
Je suis à leur côté pour dire que l’Écriture est la seule autorité, même si cela implique s’ériger contre la tradition reçue.”
Je suis absolument d’accord avec Al Mohler. Et je crois que certains, dans le monde francophone, feraient bien de suivre son exemple.
A titre personnel, je suis exaspéré d’entendre aussi régulièrement les anathèmes prononcés par les uns et les autres. Je pense qu’il y a, en la matière, beaucoup d’exagération, et que les positions adverses sont souvent parodiées voire calomniées.
En toute honnêteté, je ne vois aucune raison pour laquelle, par principe, calvinistes et non calvinistes devraient se séparer.
Ce n’est un secret pour personne que j’adhère sans réserve à la sotériologie réformée. Pour autant, je dois avouer qu’en France, les quelques figures qui m’ont inspiré ont souvent été des baptistes généraux.
Et j’en suis profondément reconnaissant.
GB
Merci à Dahlia Faltas pour la traduction.
Notes et références :
(1) Amyraldien, Molinisme, Arminianisme : trois tendances sotériologiques qui rejettent tout ou partie des fameux “5 point du Calvinsme”, c'est à dire les conclusions des Canons de Dordrecht, que vous pouvez retrouver dans les Documents historiques de référence du blog.