L’analogie de la foi : une clé d’interprétation simple mais essentielle
Quand nous lisons un texte, ne serait-ce qu’une carte postale d’un ami parti en vacance, nous sommes obligé de faire un travail d’interprétation. Qu’est-ce qu’il a bien voulu dire ? Dans quel contexte est-ce qu’il a écrit cela ? En effet, en écrivant par exemple : « Ces vacances sont longues », notre ami peut soit vouloir dire que le temps est long où il est et qu’il s’ennui, ou bien alors il veut nous faire remarquer que la durée de ses vacances est longue et qu’il est heureux de pouvoir en profiter autant. Nous allons donc devoir « deviner » en cherchant des indices dans la lettre sur quel ton il a bien voulu dire cela. Ce travail d’interprétation s’appelle l’herméneutique. Et s’il est nécessaire pour comprendre la lettre de notre ami, à combien plus forte raison il le sera pour comprendre le texte biblique qui date de plusieurs milliers d’années et qui a été écrit par des auteurs différents dans des contextes et des cultures différentes de la nôtre.
Mais parmi tous les outils que nous fournit la discipline de l’herméneutique, il y en a un qui est particulièrement important et qui est malheureusement trop souvent ignoré ou négligé par les personnes de nos assemblées. Je veux parler de ce qu’on appelle l’analogie de la foi.
1- Qu’est-ce que l’analogie de la foi ?
Ce terme peut paraître un peu obscur, mais il est en réalité très simple à comprendre. Quand nous étudions un passage biblique – qu’il s’agisse d’un verset, d’un chapitre ou même d’un ensemble plus important – nous devons toujours le confronter avec le reste de ce que dit la Bible sur le même sujet dans son ensemble. Le but étant d’arriver à une compréhension plus claire et plus globale du thème que nous sommes en train d’étudier dans notre passage.
Par exemple, vous êtes en train d’étudier un passage de l’évangile de Matthieu où Jésus parle des petits enfants. Commencez par réellement étudier ce passage sans regarder autre chose. Mais une fois cela fait, allez voir dans les autres évangiles les passages qui sont parallèles à ce texte et même les autres passages où Jésus parle des petits enfants, que ce soit dans Matthieu ou dans les autres évangiles. Cela vous donnera une compréhension plus juste de ce qu’il a voulu dire. Les petits enfants ont-ils des anges gardiens personnels ? Cela vous paraîtra clair chez Matthieu, pourtant ça le sera beaucoup moins en regardant les autres passages.
Le but est donc d’éclairer un passage avec d’autres passages pour qu’il devienne plus clair. Il y a donc quelques règles à respecter. Ce sont par exemple les textes clairs qui doivent éclairer les textes obscurs, et non l’inverse. Eclairer la doctrine généralement claire des épîtres avec l’Apocalypse est donc globalement une erreur (ce qui ne veut pas dire que l’Apocalypse n’a rien à nous apprendre en lui-même, bien au contraire). Ensuite, il faut respecter le mouvement de la Révélation progressive de Dieu. On éclaire donc l’Ancien Testament avec le Nouveau, et non l’inverse (bien que l’Ancien nous aide à mieux comprendre le Nouveau Testament).
Il ne faut pas oublier non plus ce qu’on appelle le principe de la première mention. Une chose qui est rapportée dans la Bible en premier (comme par exemple le parler en langue en Actes 2) nous aidera à mieux comprendre les autres mentions qui en seront faites par la suite. Pour ce qui est de l’intertextualité (un texte repris d’un autre texte), il faudra aller voir dans le passage original ce que l’auteur voulait dire avant de pouvoir comprendre pourquoi notre auteur fait cette citation.
Un présupposé
Il y a bien entendu un présupposé dans cette méthode qui est le suivant : toute la Bible est inspirée de Dieu et est sans erreur, infaillible. Elle fait par conséquent autorité dans nos vies. C’est cela qui va nous permettre de pouvoir légitimement interpréter la Bible par la Bible, que la Bible, toute la Bible (sans bien entendu négliger le contexte, le genre littéraire, et ce qu’ont put dire les interprètes bibliques qui nous ont précédés dans l’Histoire de l’Eglise).
Historiquement, Jean Calvin est celui qui a vraiment mis ce principe en avant dans son « Institution », bien que les Pères de l’Eglise l’utilisaient déjà avant lui. Il est tiré de la Bible elle-même, et plus précisément de l’apôtre Paul : « Nous avons des dons différents, selon la grâce qui nous a été accordée. Si quelqu’un a le don de prophétie, qu’il l’exerce en accord avec la foi » (Rm 12.6). Le mot « en accord » pouvant aussi être traduit « selon l’analogie de ».
La foi ne concernant pas dans ce passage la foi personnelle du croyant, mais plutôt l’ensemble de tout ce que le croyant doit croire objectivement (cf. Jd 3). On peut également remarquer que l’analogie de la foi va également avoir besoin des autres matières théologiques pour être faite d’une bonne manière, comme par exemple la théologie biblique et la théologie systématique (voire même la théologie historique).
Conclusion
Pour terminer, nous voyons donc que ce principe est capital afin d’avoir une saine compréhension des textes bibliques. Appliquer à chaque interprétation, il évitera beaucoup d’erreurs de compréhension, et beaucoup de fausses doctrines comme l’arianisme disparaissent d’elles-mêmes puisqu’elles sont en contradiction avec l’ensemble de ce que dit la Bible.
Bien entendu, même si la Bible est infaillible, nous sommes des êtres humains pécheurs et finis, ce qui sous-entend que notre interprétation, même éclairée par le Saint-Esprit reste faillible. Il ne faut donc pas oublier d’être humble, même avec les bons outils. Il ne faut pas non plus oublier également que la théologie est toujours en tension, mais que cette tension est nécessaire pour maintenir un bon équilibre dans notre foi.
De mon point de vue, la Bible enseigne donc la totale et absolue souveraineté de Dieu, mais également la liberté relative de l’homme qui est tenu responsable de ses choix. L’analogie de la foi pourra donc nous aider à supprimer les contradictions, mais elle ne fera pas disparaître les paradoxes bibliques. De plus, ce principe nous aidera également à mieux voir Christ dans toutes les Ecritures car il en est le sujet principal (Lc 24.44-47). L’analogie de la foi nous aidera donc à avoir une lecture plus christocentrique, mais également à enrichir nos applications pratiques en nous donnant plus d’exemples.
Je nous encourage donc à ne jamais l’oublier et à aider nos frères et sœurs dans l’Eglise à le mettre en pratique. Des chrétiens plus forts amèneront une Eglise plus forte.