Vaincre la dépression : le combat du chrétien

Des humeurs de dépression s’emparent parfois subitement de nous. Aussi joyeux que nous soyons, nous devons à l’occasion être abattus. Les vigoureux ne sont pas toujours forts, les sages ne sont pas toujours prêts, les braves ne sont pas toujours courageux, et les optimistes ne sont pas toujours de bonne humeur.

Il peut y avoir ici et là des hommes de fer, en qui l’usure et la déchirure semblent imperceptibles, mais même ceux‑là sont rongés par la rouille ; et, comme il le fait pour les hommes ordinaires, le Seigneur sait, et il leur fait savoir, qu’ils ne sont que poussière.

Sachant par expérience douloureuse ce qu’est la plus profonde dépression de l’esprit, puisque j’en ai été visité à des saisons nombreuses et peu espacées, j’ai pensé qu’il pourrait être encourageant pour certains de mes frères si je partageais ma pensée à ce sujet, afin que les jeunes hommes ne s’imaginent pas qu’une chose étrange s’est passée en eux quand ils deviennent pour un temps embourbés dans la mélancolie ; et afin que les hommes tristes sachent que celui sur lequel le soleil de justice a brillé joyeusement ne marche pas toujours dans la lumière. (1)

 

 

1- La dépression de l’âme est une profonde tristesse

Le Psaume 42 versets 1 et 2 dit : « Comme une biche soupire après des courants d’eau, ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu! Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant… » Ces paroles ne sont pas celle d’un cœur heureux, mais d’un cœur déprimé. Le reste du psaume nous démontre qu’il s’agit d’un cri de détresse et d’un désir de quitter le royaume terrestre pour entrer dans le royaume céleste de Dieu. « Quand irai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu? Mes larmes sont ma nourriture jour et nuit, pendant qu’on me dit sans cesse : Où est ton Dieu? »

Dites-moi franchement, n’avez-vous jamais eu envie de partir, non pas tellement à cause de la joie du ciel, mais à cause de la tristesse de la terre? Lorsque le ciel est sombre, il faut déjouer nos faux raisonnements qui tentent de nous faire croire que le ciel sera toujours sombre.

Il faut se rappeler que nous avons vu et avons marché sous l’éclat du soleil et que tôt ou tard la lumière reparaîtra. Cette espérance nous permet d’avancer malgré la tristesse actuelle (Rm 12.12) : « Réjouissez-vous en espérance. Soyez patients dans l’affliction. »

 

 

2- La dépression de l’âme est complexe

La deuxième remarque tirée du Psaume 42 c’est la complexité de la dépression de l’âme. Les pathologies des maladies du corps, bien que parfois inconnues, sont généralement bien identifiées. Il en va autrement des maux de l’âme. Pourquoi notre âme devient-elle triste et se décourage-t-elle? La réponse n’est pas toujours simple.

Il semble que l’auteur exprime cette perplexité lorsqu’il demande ouvertement (versets 5, 9) : « Pourquoi t’abats-tu, mon âme, et gémis-tu au dedans de moi? (…) Pourquoi dois-je marcher dans la tristesse, sous l’oppression de l’ennemi? »

Il ne comprend pas exactement ce qui lui arrive. La dépression de l’âme peut être liée à une circonstance évidente, une épreuve connue qui explique pourquoi nous nous sentons tristes et désespérés : le deuil, la maladie, un échec financier, une relation difficile, etc.

Cependant, n’avez-vous jamais ressenti une profonde morosité sans savoir exactement pourquoi ou encore sans que la cause en question ne justifie l’intensité de votre tristesse? Cela ne signifie pas qu’il n’y a aucune raison pour expliquer comment l’on se sent, mais bien que nous ne comprenons pas pourquoi notre âme est abattue.

La complexité de notre âme fait en sorte que nous n’avons pas une consolation universelle. C’est pourquoi il faut être humble, patient et compatissant envers les frères et sœurs déprimés et ne pas les voir comme étant de mauvaise foi, car souvent ils ne savent pas eux-mêmes ce qu’ils peuvent faire pour s’aider. Personne ne comprend pleinement comment son âme fonctionne.

Personne ne sait comment son corps, son péché, son enfance ou l’ennemi affectent l’état de son âme. Ce mystère ne signifie pas que nous ne comprenons rien du tout au fonctionnement de l’âme, mais bien que nous n’en perçons pas toutes les complexités. Nous devons donc nous en remettre à celui seul « qui connait les secrets du cœur » (Ps 44.22).

 

 

3- La dépression de l’âme n’est pas un péché

Nous pensons souvent à tort que la dépression spirituelle est forcément un péché. Un chrétien doit être joyeux ; après tout, il a la vie éternelle!

Être déprimé n’est pas un péché.

Je ne dis pas qu’un état dépressif ne mène jamais au péché ou que certaines attitudes lâches qui accompagnent la dépression ne sont pas coupables. Je dis que dans le Psaume 42, et dans une foule d’autres psaumes, nous retrouvons l’expression d’une profonde tristesse sans que l’auteur ne s’en repente et implore le pardon de Dieu pour son état d’âme (Ps 13.1-4 ; 25.16-18 ; 31.7-10 ; 38.6-10 ; 43.5 ; 102 ; 107 ; 116).

De grands hommes de Dieu dans l’histoire de la Bible et de l’Église passèrent par des mélancolies très intenses. Qu’on ne pense qu’à Job, à David, à Jérémie ou à Paul. Luther réclamait parfois la mort, Spurgeon a lutté toute sa vie avec des épisodes de dépression.

Un personnage bien connu de la Bible déclare ceci (Mt 26.38) : « Mon âme est triste jusqu’à la mort ». Et l’on sait que l’homme qui a dit cette parole et qui a vécu cette tristesse morbide n’a jamais péché de toute sa vie.

La dépression de l’âme n’est donc pas un péché en soi.

 

 

4- La dépression de l’âme nécessite le secours de Dieu

Le psalmiste ne demande pas pardon à Dieu d’être dans cet état, mais il lui demande néanmoins de le secourir de cet état. L’âme en dépression est exposée à la tentation et cours des risques importants. Il ne faut pas raisonner en soi-même que puisqu’il ne s’agit pas d’un péché nous pouvons attendre passivement que cet état cesse. Mais comment lutter contre ce mal qui nous attaque de l’intérieur?

 

A- Il faut sans relâche implorer le secours du Seigneur

Dans tous les psaumes où la détresse de l’âme est exprimée, nous retrouvons également d’instantes prières à Dieu pour la délivrance :

Regarde, réponds-moi, Éternel, mon Dieu ! Donne à mes yeux la clarté, afin que je ne m’endorme pas du sommeil de la mort. (Ps 13.3)

Regarde-moi et aie pitié de moi, car je suis abandonné et malheureux. Les angoisses de mon coeur augmentent ; tire-moi de ma détresse. (Ps 25.16-17)

Aie pitié de moi, Éternel! Car je suis dans la détresse ; j’ai le visage, l’âme et le corps usés par le chagrin. (Ps 31.9)

Dans leur détresse, ils crièrent à l’Éternel, et il les délivra de leurs angoisses ; Il les fit sortir des ténèbres et de l’ombre de la mort, et il rompit leurs liens. (Ps 107.13-14)

Pourquoi faut-il crier à Dieu? Parce que nous avons cette promesse (Ps 34.6) : « Quand un malheureux crie, l’Éternel entend, et il le sauve de toutes ses détresses. »

 

 

B- Il nous faut cesser de s’écouter et se parler avec la Parole de Dieu

Ce n’est pas seulement à Dieu qu’il faut parler, mais à soi-même. Deux fois le psalmiste se répète (Ps 42.6, 12) : « Pourquoi t’abats-tu, mon âme, et gémis-tu au dedans de moi? Espère en Dieu, car je le louerai encore ; Il est mon salut et mon Dieu. » J’aime beaucoup l’application que le docteur Martyn Lloyd-Jones fait de ce verset :

Nous devons nous parler à nous-mêmes plutôt que de nous écouter nous-mêmes! (…) Avez-vous réalisé que la plus grosse partie de votre malheur dans la vie vient du fait que vous vous écoutez vous-mêmes au lieu de vous parler à vous-mêmes? Prenez ces pensées qui vous viennent au moment où vous vous réveillez le matin. Vous ne les avez pas produites, mais elles commencent à vous parler, elles ramènent les problèmes d’hier, etc. Quelqu’un est en train de parler. Qui vous parle? Votre moi est en train de vous parler. Maintenant, voici comment cet homme [le psalmiste] agit ; au lieu de laisser son moi lui parler, il se parler à lui-même. « Pourquoi t’abats-tu mon âme? » demande-t-il. Son âme le déprimait et le faisait souffrir. Alors il se lève et dit : « Âme, écoute pour un instant, je vais te parler. » (…) L’art de la vie spirituelle est de savoir comment traiter avec soi-même. (2)

Il faut arrêter d’écouter notre âme, d’écouter ses gémissements et ses plaintes et lui dire : « Maintenant c’est toi qui vas m’écouter! » Puis nous devons lui parler avec la Parole de Dieu, non pas avec nos raisonnements logiques, non pas avec la parole des hommes, mais lui parler avec la Parole de Dieu.

 

 

Pour poursuivre cette réflexion, je vous invite à écouter la dernière édition de l’émission Parole d’Evangile, diffusée sur C-FOI FM (104.1 à Quebec, 102.9 à St Jérôme). J’y recevais Daniel, qui raconte comment il a sombré dans la dépression et l’anxiété et comment il est devenu dépendant des certains médicaments pour arriver à vivre normalement.

Il explique comment, par la grâce de Dieu et au moyen d’une ferme discipline, il est finalement parvenu à retrouver la liberté et à vaincre la dépendance aux médicaments.

 

Écoutez l’émission “Foi, dépression, et médicaments” en cliquant ici

 

 

 

 

 

Notes et références :

(1) Charles H. Spurgeon, Lectures To My Students (Kindle Edition, 2012), p. 152.

(2) D. Martyn Lloyd-Jones, Spiritual Depression, p. 20-21. L’auteur fut docteur du corps avant de devenir docteur de l’âme.

 

 

 

 

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Pascal Denault est pasteur de l’Église réformée baptiste de St-Jérôme. Il est titulaire d’une Licence (BA) et d’un Master en théologie (ThM) de la Faculté de théologie évangélique de Montréal. Pascal est l’auteur des livres Le côté obscur de la vie chrétienne (2019, Éditions Cruciforme) – Une alliance plus excellente (2016, Impact Académia) – Solas, la quintessence de la foi chrétienne (2015, Cruciforme) – The Distinctiveness of Baptist Covenant Theology (2017 Revised Edition, Solid Ground Christian Books).